Mauvaises nouvelles
Le premier à me marquer fut un accident de la circulation, à l’entrée de Firminy. Arrivé sur place, j’ai dû fendre la foule compacte des curieux pour parvenir à réaliser une photo des voitures endommagées, une fois les blessés évacués. Là, j’ai entendu un type dire : “Tiens, voilà les rapaces !” Je n’ai pas eu la répartie, mais le collègue du “Progrès” qui se trouvait également là lui a balancé : “Et toi, tu fais quoi ici ? Tu crois qu’on est là pour le plaisir ? On ne serait pas là s’il n’y avait pas des gens comme toi pour acheter le journal avec ces photos.”
Il ne s’agissait là que de blessés, mais la confrontation à la mort est bien pire à supporter. Je n’oublierai pas la cour de cette ferme isolée, du côté de Saint-Jean-d’Angély, où deux enfants qui jouaient sur le couvercle d’un vieux puits sont tombés lorsque le bois a cédé. Là, pas de voisins, juste les pompiers, les gendarmes et moi, tous au bord des larmes lorsque le médecin a annoncé à la famille que l’un des deux était mort. Je me suis éloigné au prétexte de fumer. Je n’osais pas photographier la scène.
J’ai pareillement senti ma présence déplacée sur un accident de la route, près de Royan, où l’ambulance mortuaire allait emporter le corps d’une jeune fille tuée au volant. Les parents de la victime sont arrivés sur place. J’entends encore le cri déchirant de la mère.